dans la lumière

Avec mon retour a l’école depuis la une dizaine de jours, et ce que ça implique comme travail de conciliation pour passer du temps avec Aimé et prendre soin de lui, je sens à quel point le temps va être une denrée rare pour moi cet automne. Je manque de temps, déjà. Je n’ai pas fini de me préparer pour mon cours de demain. Pourtant, il me semble impossible de ne pas écrire, de ne pas laisser une marque, une petite pierre sur cette case du calendrier.

Il y a quinze ans tout juste, la nuit tombait une dernière fois pour Christine, ma maman. Au matin du 10 septembre, elle s’est éteinte. Au matin du 10 septembre, avec les premiers rayons du soleil, je me suis fait réveiller doucement. C’était fini. Après les mois de maladie, d’incompréhension, d’évitement qui venaient de s’écouler, il n’y avait plus d’espoir. Mon oncle est venu nous chercher, mon frère et moi, et ma cousine qui avait passé la nuit avec nous, pour aller rejoindre mon père. Et pour aller la voir. Elle. Ma maman qui n’était plus.

Elle est décédé dans un bel endroit entouré de jardins magnifiques en cette fin d’été, la maison Michel-Sarrasin. Là-bas illes ont l’habitude des gens qui meurent. Contrairement à tant d’entre nous, illes savent encore comment faire, un peu au moins, face à la mort. Illes avaient déplacé son corps dans une pièce pleine de lumière. Les rayons du soleil y entraient de partout, entourant ce qui avait été ma mère, adoucissant un peu pour moi la transition vers l’inconnu, vers la vie sans elle qui m’avait jusque là paru être une éventualité improbable.

Mes souvenirs de ce jour-là, étonnement peut-être, ne sont pas malheureux. Ils sont un peu confus, baignés par cette lumière chaude, et par la présence de ces personnes qui allaient m’entourer encore longtemps — plusieurs étaient là pour accompagner Paul dans ses derniers instants aussi, comme répondant à un appel tacite, cri de rassemblement silencieux qui s’impose face à la mort. Ce jour-là, on a parlé, on a mangé ensemble dans la pièce ensoleillée. On a dit au revoir. Ce jour-là, j’ai commencé à apprendre comment vivre sans un pan entier de qui j’avais été. Une demi-vie plus tard, je continue a apprendre comment faire.

 

je t’aime, maman.

 
Quand elle était malade, Christine nous a demandé de ne pas nous souvenir d’elle dans cet état, dans cette douleur. Je ne sais pas si c’est elle, ou mon père qui a évoqué les images qu’elle voulait qu’on garde d’elle — en montagne, au bord de l’eau — mais c’est encore celles-là qui m’habitent…

Christine qui m’apprend à faire du ski avant le temps. Et plusieurs années plus tard, pendant une randonnée dans la Drôme.

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