Il y a un bon moment que je n’avais pas participé à une rencontre d’un groupe de soutien pour les parents endeuillés. Au printemps et à l’automne derniers, j’ai assisté à quelques rencontres de deux groupes à Québec. J’ai apprécié ces expériences dans une certaine mesure – j’ai apprécié de rencontrer d’autres parents qui partageaient l’expérience du deuil, et j’ai pu parler de Paul à des « inconnu-e-s » à un moment où c’était encore presque impensable pour moi et où, pourtant, j’avais intensément besoin de dire. Dire son nom, son histoire, sa vie.
Je n’ai pas été aussi assidue que d’autres à ces rencontres parce que d’une part, j’ai réalisé que j’arrivais mieux à explorer l’intensité de mes émotions et de ma confusion par écrit, aux moments qui me convenaient le mieux. Et puis, force est de constater que je ne me retrouve pas toujours dans les discours des personnes qui assistent aux rencontres de ces groupes. Je suis un peu gênée de l’admettre mais j’aime la liberté des ressources en ligne. Quand les propos de quelqu’un-e ne me rejoignent pas, je peux simplement fermer la fenêtre. Quand une conversation dégénère ou prend une tournure que je trouve plus dommageable qu’aidante, je vais voir ailleurs. Je ne m’oblige pas à faire l’effort de me connecter à tout le monde, même si on partage l’expérience de faire le deuil d’un enfant.
Hier soir, je suis retournée à l’un de ces groupes de soutien pour faire une présentation sur quelques ressources en ligne pour vivre un deuil. J’ai essayé d’expliquer de mon mieux ce que je retrouve dans ces espaces virtuels qui font partie de mon quotidien. J’ai essayé de décrire le sentiment d’avoir trouvé une communauté qui me ressemble, la joie de tisser des liens d’amitié avec des personnes que je n’ai jamais rencontrées mais de qui je me sens proches de par nos vécus et nos cheminements communs. Tout en décrivant tout ce que les espaces comme Glow in the woods et les quelques blogues que je suis assidument m’avait apporté, j’avais un peu peur de sembler dénigrer l’importance des groupes de soutien « en vrai ».
Visiblement, ces ressources sont cruciales pour plusieurs personnes. Peut-être parce que le modèle virtuel ne leur convient pas. Peut-être parce qu’elles n’ont pas accès, pour des raisons financières ou autres, à des ressources individuelles. Peut-être parce qu’elles sont à un point dans leur cheminement où le fait de s’arrêter du temps mensuellement pour refléter sur leur deuil leur convient bien. Mais je crois qu’une partie de la réponse se situe aussi dans les insatisfactions que beaucoup de personnes endeuillées vivent face aux réactions de leurs proches et de leur entourage – dans le manque de soutien qu’elles reçoivent, justement.
Je refais ce constat à chaque fois que j’assiste à une rencontre, et régulièrement en lisant les témoignages d’autres parents sur les divers groupes facebook et autres forums auxquels je participe. Encore et encore, des parents font état de commentaires insensibles qu’ils reçoivent. « Il est temps que tu passes à autre chose. » « Reviens-en. » « T’es jeune, t’en auras d’autres. » Plusieurs se désolent de n’avoir personne à qui parler de leur enfant. La maman d’un bébé mort à la naissance se fait renvoyer le message que son bébé n’a pas vraiment existé. Celle qui a perdu son enfant adulte voit ses autres enfants refuser de parler de la mort de leur frère.
Les exemples s’additionnent et me consternent. Il me font aussi prendre conscience de la chance immense que j’ai. Je suis consciente d’avoir une famille aimante et des ami-e-s exceptionnel-le-s. Mais je me rends aussi compte que, dans l’immense majorité, les personnes qui gravitent de manière plus diffuse autour de moi sont ouvertes, solidaires, et attentives à la réalité des autres, même quand elle est difficile. Passer une heure ou deux à entendre à quel point vivre un deuil peut être complexifié par un entourage peu empathique me fait (re)prendre conscience de l’importance d’être bien entourée.
Hier soir, assise dans ce cercle formé de parents démolis par la perte, mais aussi par la solitude, j’ai remercié en silence les personnes qui m’entourent d’avoir su m’accompagner, et continuer de le faire. Et si je ne fais pas ces remerciements adéquatement à voix haute, je veux les faire ici…
Merci d’être là. Merci de m’entendre, de me lire.
Merci d’accueillir les moments où j’ai besoin de parler de Paul.
Merci d’accepter ce que je vis, à mon rythme.
Merci de m’avoir laissé ré-apprivoiser la vie en votre compagnie.
Merci de me poser des questions sur Paul, même si ça demande du courage.
Merci de me redire qu’il est beau même s’il n’est plus là pour recevoir les compliments.
Merci de m’inclure dans les conversations sur la grossesse, l’allaitement, ou le quotidien avec un bébé.
Merci de reconnaître que bébé-lentille ne sera pas notre premier bébé.
Merci de tout ce soutien.
celui très présent des premiers moments, quand j’avais besoin de béquilles pour faire le moindre pas.
celui tout aussi important, qui s’étire dans le temps…
celui très intense, dont j’ai besoin quand la réalité me rentre dedans comme une lame émoussée se frayant un chemin entre mes côtes.
celui du quotidien, qui n’a l’air de rien, mais me permet de continuer à avancer.
merci. xx
online support has been vital for me too. much gratitude sent your way as well.
Thank you Meghan.
Je crois qu’il y a beaucoup de variable qui jouent sur la façon de vivre son deuil. L’entourage en est une grosse partie. De mon côté, ce n’était pas aussi facile de parler de ma fille. Les groupes de soutien m’aident pour cette facette. À mon tour de te dire merci. Merci pour ce partage d’émotions, d’expériences et de « vie après ».
You are very smart to have found the resources that fit for you. I think many really struggle with this for a variety of reasons. I think many end up getting so much « support » that it takes over their life (for little benefit), or alternatively, become so frustrated by the support they get that they no longer seek it at all. Personally, I am involved in support groups (3 of them, locally), but I find that my day to day connections and support are through blogs and virtually. So, thank YOU for that:). I also appreciate a few very special people in my life who continue to acknowledge with me, regularly, the massive hole that was left by Zachary (and by B.W.).
I am so glad you feel like you’ve received such an outpouring of support from your friends and family. It is so special to be able to share Paul and your grief with those who are actually part of your life…, were part of Paul’s, and still love both of you.
Yes, you’re right, i think there is something special about being able to have conversations with people who also love(d) our babies. Being able to talk about them with people who share a part of our pain that they are not with us anymore…
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