Paul. Mon amour,
Le printemps est enfin là. Le soleil brille ce matin sur Sainte-Christine, la rivière est gonflée de pluie et de neige. Les feuilles mouillées collent sous nos pieds, les oiseaux sont ressortis. Une journée de printemps parfaite et banale. Mais rendue douloureuse par ton absence.
Ton absence est tellement immense. Elle est partout autour de moi, dans chaque détail de la vie quotidienne. J’aimerais tellement que tu saches à quel point tu me manques. J’ai l’impression qu’on m’a volé le bonheur de te découvrir, d’apprendre à te connaître, de voir ta personnalité prendre forme avec les mois et les années. Je me sens vidée, drainée, depuis ton départ. Ratatinée sur moi-même. Incapable de profiter de la beauté de quoi que ce soit, confrontée à l’insignifiance de la vie, à sa cruauté aveugle. Mes pensées tournent en rond. Elles vont vers toi souvent, mais aussi, je dois l’admettre, vers moi.
Je me sens misérable et j’ai de la misère à faire la part des choses. Je n’arrive pas à relativiser. La peine qui m’habite prend toute la place. Elle m’écrase et me déchire. Me malaxe. M’aveugle. Je ne vois rien d’autre que ce trou béant en moi. J’ai l’impression que ma vie est abîmée au-delà de ce qui peut être réparé. Même si je réussis à repriser cette immense déchirure, elle sera toujours là. Une ligne de faille rendant mon être fragile à jamais.
Aujourd’hui j’ai lu une phrase qui allait dans ce sens.
Your absence has gone through me like thread through a needle
and everything I do is stitched with its color.Ton absence m’habite comme le fil passé dans une aiguille. Sa couleur est tissée dans l’étoffe de tout ce que je fais.
Je ne sais pas quoi faire sans toi, mon petit marcassin. Je sais que c’est dans l’autre sens que les choses devraient aller. C’est moi qui devrait être là pour toi.
Je veux croire à ce que je t’ai dit pendant tes dernières heures, tes dernières minutes. Nous serons toujours là pour toi. Tu seras avec nous pour toujours. Je veux me tenir à ces paroles, les rendre chaque jour réelles.
Mais le défi est immense. Comment t’entendre dans le chant des oiseaux, comment te sentir près de nous dans ces lieux que j’avais rêvé de te voir découvrir? Tu n’es pas là. Tu n’es plus là, près de nous, dans la chambre où je t’ai senti bouger pour la toute première fois l’été dernier. Dans la chambre où on a dormi tout les trois, au cœur de janvier, portés par la joie de te faire connaître la forêt, un tout petit peu, depuis la chaleur du porte-bébé.
Comment te voir dans la rivière alors que j’avais tellement hâte de te faire goûter le bonheur de l’eau froide au milieu d’une journée d’été? J’ai tellement imaginé te sentir t’agripper à moi, dans l’eau. J’avais hâte d’aller acheter un tout petit VFI pour te protéger, te faire flotter. Je m’accroche encore à ces préoccupations terrestres. Je ne suis pas encore prête à t’abandonner à d’autres sphères.
Je te veux ici. Avec moi. Pas dans le vent, ni l’eau, ni le bruit des feuilles. Ni dans le ciel. Encore moins au ciel.
Just tears and shaking my head in agreement. Your point about clinging to earthly concerns about Paul, not willing to yet give him up to other spheres. Yes. Yes. That is it precisely.
We used that W. S. Merwin quote in Zachary’s obituary and in the memorial cards we gave to attendees of his funeral.
Sending you strength for this week ahead.
Thanks for letting me know who the author of the quote is.
I read that on Glow in the woods and when i posted this yesterday, i was on my phone and chose not to look it up… I corrected and cited the source. It is such a powerful image…