mon Paul,
je t’écris dans le noir du petit matin hivernal, assise dans le salon de ton arrière-grand-mère — une de tes arrière-grand-mères. Depuis notre arrivée en France, nos nuits sont agitées. Ton petit frère peine à s’ajuster aux six heures de décalage horaire qui nous séparent de notre horaire habituel. Il se tourne et se retourne et se réveille et nous réveille. On se lève tard. Les journées sont courtes, trop courtes. Elles passent à toute vitesse.
On vient de descendre de l’avion, il me semble, et pourtant la fin du voyage semble déjà se profiler, dans un après-demain hâtif.
Je m’étais imaginé avoir du temps pendant ces vacances. J’avais pensé pouvoir écrire. Travailler sur mon projet de maitrise. Prendre le temps. T’écrire. Lentement. Écrire des cartes postales, pour le plaisir de briser un peu le rythme effréné de mes communications normales. J’avais mal tenu compte de la réalité, il faut croire. Je manque de temps.
Je manque de temps, alors je vole des minutes à la nuit pour t’écrire. Au moins à toi. Les autres cartes postales attendront. À demain. Ou au au prochain voyage. Mais pour toi, il faut que j’arrache quelques instants au sommeil. Surtout aujourd’hui. Surtout maintenant.
mon Paul,
il y a trois ans exactement, je ne dormais pas non plus. Ton arrivée était imminente; j’étais impatiente de te rencontrer. Ces premières journées de l’année, de mes années, sont les tiennes. Les heures s’écoulent au rythme des souvenirs de ton arrivée, lentes, intenses. Hors du temps et du mauvais temps.
Demain, tu aurais eu trois ans. Je voudrais te connaitre à trois ans. Je voudrais découvrir qui tu serais, qui tu aurais été, qui tu es. Je voudrais t’entendre. Te voir jouer. T’amener, toi aussi, au bord de la mer. T’apprendre à aimer l’eau bleu-gris, le ciel bas, le vent dans les cheveux, les marais salants, les coquillages trouvés, les rochers, les algues qui éclatent – pop! – lorsqu’on les presse entre les doigts. Je voudrais partager avec toi une galette des rois au bord de l’eau. Je voudrais.
Je voudrais tant. Je voudrais tout.
Je voudrais que tu sois.
Tu seras avec nous.
Tu es avec nous aujourd’hui, toujours.
Tu seras avec nous demain.
Et puis je te raconterai.
je t’aime, petit marcassin.
Bon anniversaire Paul, petit marcassin des nuages ❤
Comme je te comprends, ce désir si intense de connaître aujourd’hui qui serait ton petit marcassin. Cette présence qui manque toujours dans ta vie et qui ne sera jamais comblée.
Ces mots sont bien peu, mais sache que depuis hier soir l’image de ton petit Paul et des forêts enneigées m’habite. Je vous envoie une pensée spéciale pour lui pour son troisième anniversaire. Je t’embrasse.
Merci infiniment à vous deux. Merci de faire vivre Paul dans vos cœurs.
Ça m’émeut profondément de le savoir présent, de l’imaginer dans les nuages et dans la neige et au bord de la mer (où nous étions hier pour souligner ses trois ans). xxx