Mon bébé,

Faute de pouvoir te bercer, te tenir contre moi, t’allaiter, j’ai besoin de te parler, de t’écrire. Chaque matin au réveil, parfois après une nuit peuplée de rêves dans lesquels tu es là, de loin ou de près, je croise ton regard. Sur la photo de toi qui est accrochée près de notre lit, tu fais beaucoup plus vieux que tes trois semaines, peut-être un peu à cause de l’agrandissement, certainement aussi parce que tu y as les yeux grands ouverts. Dans ton regard, j’imagine plein de pensées, de souhaits, de projets. J’imagine les messages que tu me lances. Et je te réponds.

Je te parle en faisant à manger, t’imaginant assez grand pour goûter aux patates douces.

Je te parle en faisant des petits changements autour de la maison, menus projets que je croyais accomplir en ta présence au cours de ces mois sur le bras du RQAP. Par moments, je te demande pardon d’avoir eu peur de m’ennuyer, seule avec toi à la maison, mais je ne m’attarde pas trop à ça parce que les semaines qu’on a partagées m’ont fait entrevoir clairement le bonheur qu’on aurait vécu ensemble, au chaud dans la maison entourée par l’hiver.

Je te parle en courant ou en nageant, te rassurant sur le fait que si je veux retomber enceinte éventuellement, ce n’est pas pour te remplacer. Tu seras à jamais le grand frère dans notre petite famille.

Je te parle en regardant les photos de toi. Ce matin, j’en ai remarqué une qui était passée inaperçu jusque là. J’espère qu’il y en a d’autres comme ça, pour me faire vivre furtivement le bonheur de te voir sous un nouvel angle.

Blackfly_Ball_2010_largeJe te parle souvent. Étrangement, ou peut-être pas tant que ça, je ne te vois pas tel que tu aurais été, du haut de tes 3 mois et demi. Je t’imagine plus éternel, à la fois minuscule et immense. Encore dans la douceur de la petite enfance mais possédant toute la sagesse du monde. C’est peut-être ce sentiment qui pousse autant de parents à voir leurs petits qui les ont quittés trop vite comme des anges? Cette idée d’éternité me rejoint, au fond, mais tant qu’à t’imaginer au ciel, je te vois plutôt entrain de profiter de ce que tu n’auras pas eu le temps de vivre. Te rouler dans l’herbe chaude et humide de l’été, t’endormir dans un hamac, faire de la musique sur une casserole, dessiner sur les murs…

J’espère que tu es bien.
Je t’aime — les mots me manquent pour dire à quel point.
Image : Beehive Design Collective

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