six mois

Photo 2014-07-29 20 22 12Une demi-année à essayer de reprendre pied.

Nous passons quelques jours à camper, comme nous aurions tant souhaité le faire avec Paul. À la place, je pense à lui, au temps qui nous sépare. Il y a six mois, je sentais le sol se dérober entièrement sous mes pieds. La veille, le 29 janvier, avait commencé normalement, banalement. De la visite, des couches à changer, une bouche à nourrir, encore et encore, des bisous à donner. J’ai allaité Paul une dernière fois, sans me douter de quoi que ce soit, heureuse d’être là avec lui. Je m’apprêtais à envoyer des photos de lui et des lettres décrivant le bonheur que nous vivions de l’avoir enfin dans nos bras. Je regardais une dernière fois les photos avant de cacheter les enveloppes. Les premières photos imprimées de Paul, des images choisies parmi les centaines prises pendant ses trois premières semaines de vie. Les enveloppes seront finalement parties vers leurs destinataires une fois l’inimaginable arrivé, parce que ne pas les envoyer m’aurait semblé une insulte à la mémoire de Paul.

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répétitions/rituels

J’ai l’impression de me répéter.
De revivre maintes et maintes fois les mêmes choses, de redire encore et encore les mêmes histoires. C’était très prononcé dans les semaines qui ont suivi la mort de Paul. Éventuellement, ça s’est calmé un peu. Mais un peu seulement.

Doucement, je m’habitue à l’idée mais je continue de sentir le besoin initial de dire. Dire la vie de Paul, son départ, le vide que sa mort a créé, mon expérience de mère, avant et après son décès. Je répète. Je me répète. J’essaie de me faire à l’idée. J’essaie de saisir la situation, littéralement. J’essaie de la comprendre, de la prendre avec moi, de la rendre mienne. J’essaie de combattre le sentiment d’irréalité qui s’est imposé dès les premiers instants où j’ai su que quelque chose n’allait pas, que Paul allait mal.

À ce moment, je m’étonnais encore de la présence de Paul. J’imagine que je ne suis pas la première à avoir vécu ce sentiment surprenant. Prendre la mesure de la beauté du processus à la fois si simple et si complexe qui permet la conception. S’extasier devant la magie nécessaire pour qu’un humain en bonne et due forme pousse dans le corps d’un autre. D’une autre.
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