du beau

Octobre est un mois dédié à la sensibilisation au deuil périnatal. Pour plusieurs parents, c’est un moment pour prendre du recul, pour faire le point sur leur vécu, et pour partager leur amour pour leur.s bébé.s, notamment par le biais de projets créatifs comme Capture Your Grief (qui propose un thème quotidien pour explorer le deuil par le biais de la photo, un projet auquel j’avais participé activement en octobre 2014).

L’autre jour, au détour d’un échange sur complètement autre chose, j’ai lu cette phrase qui me semblait toute désignée pour les parents qui vivent un tel deuil, et particulièrement pour les personnes qui s’embarquent dans cette aventure photographique pour un mois. Des personnes qui, face à la souffrance, arrivent à créer du beau*…

The most beautiful people we have known are those who have known defeat, known suffering, known struggle, known loss, and have found their way out of the depths. These persons have an appreciation, a sensitivity, and an understanding of life that fills them with compassion, gentleness, and a deep loving concern. Beautiful people do not just happen.

— Elisabeth Kübler-Ross

* Cela dit, tout le deuil n’a pas à être « beau ». Ce qui doit être vécu peut l’être, sans égard à des critères esthétiques et sans s’inquiéter de « bien » faire son deuil…

je suis une mère féministe

Ces réflexions sont inspirées entre autres par des thèmes proposés par le projet capture your grief — explore & express. Plutôt que d’explorer où j’en suis dans mon cheminement de deuil, je part du stade où je suis rendue, quel qu’il soit, pour tenter d’exprimer un aspect plus politique de mon expérience comme mère.

Depuis quelques années déjà, je m’intéresse à différents aspects de la maternité, du maternage, de l’éducation des enfants. Au début de mon bacc (en études féministes), je me suis retrouvée l’une des seules étudiantes sans enfant à m’inscrire au cours Images of motherhood. À ce moment-là, je réfléchissais en termes assez détachés de la possibilité d’être une mère féministe, éventuellement. Lire la suite

capture your grief 14/15

day 14 — dark/light
day 15 — community

light-dark

la flamme des bougies

symbole collectif
traditionnel ou réinventé
partagé

symbole d’espoir
de fragilité
de chaleur

la flamme des bougies

qui brille mieux dans le noir
qui s’y éteint plus violemment aussi
à l’image de celles et ceux qui naviguent
la mort, le souvenir, le deuil

qui apprennent
à tâtons
à avancer dans le noir
à travers les branches et les fossés

qui apprennent
à tomber
à avancer dans une mare de goudron
à ne pas asphyxier

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capture your grief 13

day 13 — season / jour 13 — saison

Au Québec, les saisons se succèdent sans trop se préoccuper de respecter des dates officielles de début ou de fin, alors j’ai l’impression que Paul a fait le tour du calendrier saisonnier, bien à l’abri dans mon utérus. Mais depuis le début, Paul est pour moi un bébé de l’hiver.

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capture your grief 9 / 10

day 9 — in memory

1801265_10151919328267021_986267778_o Dès les premiers jours du deuil, j’ai senti le besoin de marquer la présence de Paul dans ma vie sur mon corps. À l’hôpital une infirmière avait dessiné des petits X à l’intérieur des chevilles de Paul pour pouvoir prendre son pouls toujours au même endroit. Le dernier jour, alors qu’on se préparait à dire aurevoir pour la dernière fois, je me suis dit que j’allais immortaliser ces marques sur mon corps. Deux semaines plus tard, au lendemain de la cérémonie pour Paul, je me suis fait tatouer les petits X, signe de la vie dans les pieds de mon bébé, signe de son passage, stigmate de l’absence trop immense. La douleur physique très temporaire, un instant en adéquation avec ma peine. Lire la suite

capture your grief 7/8

day 7 — sacred place / jour 7 — espace sacré
day 8 — ressource / day 8 — ressource

Qu’est-ce qu’un lieu, un espace sacré quand on ne croit pas? La possibilité de se rabattre sur les lieux de culte officiels serait à mes yeux un peu hypocrite. Dans la vie courante, je suis critique de l’Église. Je participe occasionnellement à des cérémonies entre ses murs par respect, amitié ou solidarité pour d’autres personnes qui choisissent d’y souligner des moments importants de leurs vies, mais je le fais avec la réserve d’une personne étrangère à ces lieux.

Il n’a jamais été question pour nous de faire baptiser Paul. À l’hôpital, malgré les offres qui nous ont été faites, nous n’avons pas non plus souhaité rencontrer un aumônier. La religion s’est taillée une petite place autour du décès de Paul par le biais de proches qui se sont tournées vers le divin pour faire face à cette mort insensée. Mais cette place est restée dans le cœur, la tête, la foi des autres. Lire la suite

capture your grief 5/6

day 5 – journal

1000days_Collage

While i was expecting Paul, i looked for a book to collect our memories of him. I imagined we would create so many of them, for so long, as we learned to live with a baby, as we discovered him/her, as we went on adventures together… I didn’t like most of the baby album available, often intensely gendered and to intricate in their design for my taste.

Despite my initial good intentions, I had not kept a regular journal during my pregnancy – perhaps because I didn’t enjoy myself that much and wouldn’t have wanted my child to read about my petty complaints. But I was determined to chronicle my baby’s first year, or, as the journal I finally found suggested, his First 1000  days.

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capture your grief 3/4

day 3 — before

beforei am unsure of when « before » is
i was changed by the arrival of Paul in our lives
already, i wasn’t exactly the same as i used to be

the before in this image
before Paul was gone
before he was no longer with us
it shows
the person i longed to be
the person i hoped to be

a mother holding my child’s hand
through the world
guiding him
letting myself be guided

Paul was two weeks old
sleeping against me
protected from the cold by the warmth of my body
womb-like, through the forest

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